The Buddha, the Godhead, resides quite as comfortably in the circuits of a digital computer or the gears of a cycle transmission as he does at the top of the mountain, or in the petals of a flower. To think otherwise is to demean the Buddha – which is to demean oneself.

Robert M. Pirsig, Zen And The Art Of Motorcycle Maintenance: An Inquiry Into Values

On commence à avoir l’habitude.  Les gens, et les médias aussi, déforment tout.  Et de nos jours on ne fait plus aucune différence, dans la culture populaire, entre un « hacker » et un pirate informatique.

C’est triste.  Surtout, parce que le concept de « hacker » est utile.

Du temps jadis, quand Internet était rempli de forums Usenet en « plain text » (et non pas en « plein texte »), que les consoles Unix n’étaient pas de jolies fenêtres semi-transparentes sur un environnement graphique haute définition, que les distributions Linux se méritaient (ah, patiemment copier les disquettes 1.44Mb en raw, une par une, à la main…)…  du temps jadis où « les hommes étaient des hommes et codaient leurs pilotes de périphériques eux-mêmes »…  on ne confondait pas tout.  On ne pouvait pas.

Oscillant entre une installation boiteuse d’OS/2 et de Red Hat sur mon vieux 486DX (33 Mhz !), je lisais alors Eric S. Raymond.  L’un des auteurs qui a très certainement le plus et le mieux influencé ma vie.  Sous ses aspects crades de geek aux cheveux gras, « ESR » était, et est toujours, un véritable génie.  Génie de l’informatique, bien entendu.  Mais surtout un bel esprit, qui comme beaucoup avant lui (et de plus en plus après, on se fait vieux) qui a mis le doigt sur ce concept.  Qui l’a nommé.  Qui l’a souligné.  Le mot « hacker » a été popularisé par lui.  Le mot « open source » aussi.

En français, « hacker » se traduirait maladroitement par « bidouilleur ».  Mais bidouilleur a un côté un peu péjoratif et approximatif qui ne va pas du tout avec « hacker ».  Le hacker, pour être clair, est celui qui :

  • aime comprendre comment les choses fonctionnent ;
  • n’en a rien à br… des opinions des gens, des conventions sociales, des traditions de pensée…  seuls les résultats comptent (et donc les effets de nos actes sont à surveiller bien plus que leur forme) : ils vivent dans un monde de rigueur éthique intrinsèque, et pas de carcans moraux ;
  • arrive à faire exploser les cadres, les conventions, les « ça ne se fait pas » pour trouver des solutions nouvelles, créatives et originales à des problèmes divers et variés.

Ce que le hacker préfère, c’est quand on lui dit « non mais ça, c’est pas possible »…  Là, au fond de ses tripes, une lumière rouge s’allume et il s’énerve froidement.  Et il commence déjà à chercher comment prouver que ça l’est.

Vous voyez les gens qui ont ramené l’équipage d’Appolo 13 à bon port en utilisant des chaussettes, du scotch et des trucs farfelus ?  C’étaient des hackers.

Vous voyez le mec qui a inventé le feu par friction, il y a des millions d’années ?  C’était un hacker.

Vous voyez ce jeune qui a inventé un test sanguin peu coûteux, low tech et super efficace pour détecter les marqueurs cancéreux ?  Typiquement un hacker.

Bien…  Maintenant, pour être un bon pirate informatique, il faut aussi être un bon hacker. Mais de rendre les deux synonymes est juste trop dommage.  Et trop bête aussi.

Léonard de Vinci était un superbe hacker.  Très célèbre…  Nicolas Tesla, aussi.  Un incroyable hacker, celui là…  🙂

Comment développer l’esprit du hacker en vous ? (à vos risques 😉

  • transgressez certaines normes sociales inutiles.  Eh oui.  Habituez vous.  Désensibilisez vous.  Quittez peu à peu votre phobie de ne pas être parfaitement dans les clous.  Sortez du cadre.  Vraiment je veux dire.  Dites des gros mots.   Acceptez de passer pour un fou ou une folle une fois de temps en temps.  Allez péter un coup dans un lieu public, et souriez en soupirant d’aise au moment où les gens vous regarderont d’un air gêné.  Au feu rouge, allez chercher un truc énorme dans votre nez et jetez le par la fenêtre avec une pichenette gluante.  Et souriez. Asseillez vous par terre.  Refusez l’apéro.  Faites des conneries…  riez.  Evidemment, n’allez pas violer des lois ou faire du mal aux gens hein.  L’idée ici est simplement de se désensibiliser à la pression sociale.  De s’habituer à faire des trucs farfelus…  d’être original aux yeux des autres.  En voyant qu’on peut faire ça sans mourir, on commence à intégrer peu à peu l’idée que la créativité n’est pas mortelle.  Et que de penser en dehors du cadre peut aussi être envisageable.  Et ça commence par des actes en apparence banals comme ça.  Bien entendu, utilisez votre jugement.  N’allez pas tout faire péter dans votre boulot ou votre famille…  allez y souplement, dans des lieux choisis, dans des contextes où ça n’aura pas de répercussions fâcheuses…  Commencez cool et vous verrez peu à peu que c’est souvent moins dramatique qu’on croit, surtout quand on explique la démarche à son entourage.  Evidemment, comme en faisant ça vous affirmerez haut et fort votre liberté, ça peut en énerver certains qui préféreraient vous voir la fermer.  A vous de gérer intelligemment hein.
  • libérez votre corps : nous comprenons de mieux en mieux comment le corps et sa liberté de mouvement influencent l’esprit.  Bouger avec son corps, lui faire faire des choses originales et hors cadre permet de libérer aussi l’esprit.  Les traditions millénaires Indiennes l’ont découvert, expérimenté et développé depuis un bail hein, mais nous on a besoin de preuves…  Ben maintenant ces preuves émergent, notamment grâce aux neuro-sciences.  Faites du yoga.  Grimpez sur les murs.  Lancez des trucs.  Jouez et vautrez vous par terre.  Faites des trucs compliqués avec votre corps.  Et des trucs « hors cadre ».  Ca aidera votre esprit à s’autoriser à faire de même aussi.
  • libérez votre esprit : sans nous en rendre compte, nous éliminons tout un tas de solutions, de conceptions du monde et d’hypothèses, dans une phase de pré-traitement des informations qui est nécessaire pour ne pas devenir cinglé, mais qui peut se régler finement.  Quand on cherche une solution, il faut faire attention à la manière dont le langage (inventez vous des mots au besoin), notre culture, nos catégories mentales, nos conditionnements, nos habitudes, notre état physiologique peuvent influencer nos perceptions, et littéralement nous priver de pans entiers d’informations utiles.  Soyez libres.  Soyez créatifs.  Votre esprit et votre intelligence n’ont aucune limite, sauf celles que vous acceptez (sisi, je crois que l’intelligence est une compétence qui s’acquiert, même si elle a peut être une part innée…  je pense aussi que c’est long à développer donc plus on commence tôt, mieux c’est…  mais on peut toujours progresser).
  • n’ayez pas peur d’échouer : au besoin, anticipez les conséquences d’un échec et prévoyez des plans B et C.  Pas grave.  L’échec est normal en fait.  Et c’est une source d’infos précieuses…  Vous vous planterez 20 fois avant de réussir, et profitez du paysage sur le chemin, parce que quand vous réussirez ça sera fini, faudra trouver un autre projet 😉
  • comprenez comment ça marche : pour tout, il y a une mécanique à piger.  Absolument tout.  Une fois que vous avez compris les mécanismes en oeuvre, subitement tout devient limpide et vous pouvez agir sur le système.  En faisant ça, j’enseigne à des citadins ordinaires qui sortent à peine de leur bureau à dormir dehors sans sac de couchage même par des températures négatives parfois…  et ça marche.  En faisant ça, j’arrive à faire comprendre des concepts complexes à des enfants de 8 ans.  En suivant les enseignements de gens qui ont fait exactement ça, j’arrive à toucher une cible de 20cm de large à 200m 10 fois sur 10 avec un fusil.  En moins de 10 secondes.  Le but n’est pas de me vanter…  c’est plutôt de montrer que la méthode fonctionne.
  • soyez teigneux : ne lâchez rien.  N’abandonnez jamais…  Patience, constance, boulot.  Trop de bons hackers deviennent mauvais parce qu’ils pensent que le travail est dangereux 😉

Ceci dit, je dois vous mettre en garde.  Il y a des gens qui vont s’énerver.  Certains vont vous trouver dangereux.  Vous allez passer pour de dangereux intellectuels.  Vous allez faire peur.  Vous allez rencontrer des résistances, surtout dans les institutions sclérosées où le nivellement par le bas et le conformisme sont garantes de l’immobilité des postes et des pouvoirs établis.  Vous allez gonfler plein de gens.  Vous allez changer de groupe d’amis.  Vous allez peut être même perdre votre boulot, devenir pauvre, tout ça…  🙂  Ca peut aller loin dans la connerie.  Mais vous pourrez aussi plus facilement résoudre des problèmes, prendre du recul, trouver des solutions…  😉