Beaucoup de nos stagiaires sont surpris de constater que, pour nos stages de survie, nous exigeons qu’ils aient un gros sac de couchage — préférablement en synthétique — avec des normes de températures qui semblent démesurées. Patiemment, nous leur expliquons systématiquement que ce sac de couchage un peu surdimensionné en apparence est littéralement leur assurance-vie sur le terrain. Explications.

Parmi les outils de survie les plus incroyablement efficaces, il y a assez peu de « petites » choses. Et si, évidemment, il existe de nombreux « kits » ultra compacts pour survivre ou s’évader en tout dernier recours, aucun d’entre eux n’a jamais remplacé et ne remplacera jamais les « gros » éléments basiques. Et oui, parmi ces gros basiques encombrants mais incontournables il y a le gros sac de couchage. Et oui, on veut qu’il soit vraiment gros, vraiment chaud, vraiment en bon état et, idéalement, vraiment garni en isolant synthétique.

Un sac de couchage un peu trop chaud pour la saison (en théorie) et rempli d’isolant en synthétique a plein de défauts, évidemment :

  • il est GROS. Par gros, on entend réellement trop gros. Toujours. Il prend les trois quarts du sac à dos. Il est peu compressible. Et il nous oblige à prendre un sac à dos plus grand pour caser tout le reste, en randonnée. Oui.
  • Il est lourd. A capacité d’isolation égale (dans un monde idéal), il est presque deux fois plus lourd que son équivalent en duvet de bonne qualité. Il faut régulièrement compter 2,5kg pour un sac de couchage 0°C « température limite supérieure ». 3,5 voire 4kg pour un -15°C confort aux normes.
  • Il coûte cher. Parce que oui, pour avoir de la bonne qualité, on doit quand-même mettre un billet. Et même si le sac de couchage en synthétique est moins cher que son équivalent en plume, ça reste quand-même un budget.
  • Il est trop chaud. Quand tout va bien.
  • Il vieillit plus vite que le sac de couchage en duvet. On compte environ 1% de perte de capacité isolante pour un sac de couchage en synthétique pour chaque cycle de compression / décompression, alors que le sac en duvet peut rester très isolant pendant des décennies si on le traite correctement.

Alors pourquoi on insiste autant dans nos listes de matériel ? A quoi ça sert ? Quel sens est-ce que ça a ? Parlons pratique et expérience de terrain.

  • Le gros sac de couchage permet de pallier aux imprévus de la météo. Car oui, la météo est très changeante et imprévisible, et les modèles météo actuels — à cause du changement climatique — sont de moins en moins en mesure de prévoir les ruptures de normalité qui peuvent survenir. J’ai personnellement vécu plusieurs fois, en stage, des chutes de neige ou des tempêtes de verglas alors que trois jours avant tout le monde était en shorts. J’ai aussi vu plusieurs fois des vagues de froid toutes relatives mais très surprenantes en plein coeur de l’été : 12°C avec du vent et de la pluie quand la veille il faisait 32°C, ça fait un contraste incroyable, qui surprend les corps et les esprits. Et dans ces moments, les sacs de couchage légers, pas chers et pratiques à transporter deviennent notoirement insuffisants. Et le gros sac de couchage permet de passer une nuit (voire la journée) en sécurité.
  • Le gros sac de couchage permet de pallier aux imprévus relatifs à notre état physiologique. Une blessure, un état fébrile, une hypoglycémie, un coup de fatigue… tout ça peut aussi arriver sur le terrain. Et dans ces moments de stress physiologique, le fait de pouvoir rester immobile, de se reposer ET continuer d’avoir chaud est incroyablement précieux, voire vital parfois.
  • Le gros sac de couchage en synthétique continuera d’être chaud même s’il est humide, voire carrément mouillé. La nature hydrophobe de sa fibre isolante fait que ses propriétés mécaniques ne changent pas en présence d’eau. En clair, même mouillé il continue de « gonfler » relativement bien et donc à emprisonner de l’air et à isoler. Il faut idéalement quand-même éviter de le tremper (parce que toute l’eau contenue dans ses fibres devra in fine être réchauffée et évaporée par la chaleur de notre corps). Mais ses propriétés isolantes sont plus robustes en ode « dégradé » que le duvet. Le gros sac de couchage en synthétique permet donc de compenser les effets de l’humidité sur notre corps et même sur nos vêtements : on peut s’y réfugier pour « sécher » si on est trempé, (tout en sachant qu’il faudra le faire sécher lui-même ensuite).
  • Il permet de se passer de feu, et donc d’être à la fois safe et discret là où on dort. Avec un sursac étanche, il permet sans problème des nuits royales à la belle étoile en toute discrétion, derrière un buisson. J’ai ainsi déjà passé des nuits de fortune, à proximité d’aires d’autoroute ou dans des parcs urbains, totalement invisible dans un sursac, derrière un buisson.
  • Si on a trop chaud dedans, on peut aussi l’ouvrir et s’en servir comme édredon, en laissant sortir un pied ou une épaule. « Qui peut le plus peut le moins »… et ce petit inconfort très relatif est totalement compensé pour le jour où on se retrouve avec un début d’hypothermie à gérer. Vraiment.

Concrètement, si vous cherchez un outil de survie polyvalent, simple à utiliser, incroyablement efficace et robuste, c’est clairement le sac de couchage. Et donc en stage de survie, on apprend à bien l’utiliser au niveau 1 puis on l’a en guise de base de repli pour les N2, N3 et tous les autres stages que nous offrons.

Pour plus de détails sur les normes relatives aux sacs de couchage, un excellent article du site « randonner malin ».